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Résultat scientifique | Nanotoxicologie

Nanoparticules : une méthode pour étudier les faibles doses


​Pister la bioaccumulation des nanoparticules à des doses environnementales est un vrai défi scientifique. Deux équipes du CEA Saclay (DSM-Iramis et DSV-IBITECS) sont parvenues à suivre le parcours  de nanoparticules de dioxyde de titane à des doses environnementales dans des moules de rivière.

Publié le 16 avril 2015

Les nanoparticules de dioxyde de titane (TiO2) se retrouvent couramment dans les produits d'usage quotidien et notamment dans les produits cosmétiques1. Elles se disséminent donc inévitablement dans notre environnement. Leur faible diamètre2, inférieur à 100 nm, pose la question de leur toxicité pour les organismes vivants. S'accumulent-elles tout au long de la chaine alimentaire ? Passent-elles les barrières digestive, hémato-encéphalique ? Sont-elles rejetées par l'organisme, accumulées dans certains organes ? Avec quels effets sur la santé ? La difficulté réside dans la modélisation d'effets de doses réalistes, qui sont extrêmement faibles3.

Dans le cadre du programme transverse de Toxicologie du CEA, les physico-chimistes de la DSM  (IRAMIS/NIMBE) et les biologistes du CEA-IBITECS, en collaboration avec Sorbonne Universités, l'UPMC4, le CNRS et le Collège de France, ont montré qu'il est possible de suivre les effets de nanoparticules TiO2 à des doses environnementales. Les chercheurs ont utilisé comme modèle une moule d'eau douce, la Dreissène. Ils ont reproduit son environnement naturel avec une eau reconstituée de rivière (eau minérale sans polluants). « On retrouve du Ti à l'état naturel un peu partout dans notre environnement, explique Corinne Cassier-Chauvat, chercheur au CEA-IBITECS. La difficulté technique est donc de discriminer le Ti naturel de celui provenant des nanoparticules manufacturées. Pour cela, le marquage des nanoparticules avec le 47Ti, un isotope stable rare dans l'environnement, a été réalisé. » Les Dreissènes ont donc été baignées dans de l'eau de rivière reconstituée contenant des nanoparticules marquées au 47Ti à des doses environnementales. Elles ont également été nourries avec des cyanobactéries (base de la chaine alimentaire) elles-mêmes « polluées » à faible dose par les nanoparticules. Après 1 heure d'exposition, les moules (hors coquille) ont été analysées par spectrométrie de masse révélant que les nanoparticules se sont accumulées et que la dose d'exposition et le degré de bioaccumulation sont directement corrélés. Pour tester si cette accumulation est transitoire ou stable, les moules ont été remises dans de l'eau non contaminée. Après 72h, la majorité des nanoparticules a été rejetée via le système digestif. Une infime partie a passé la barrière intestinale, pouvant alors potentiellement s'accumuler dans les tissus. Ce travail constitue une preuve de concept et montre que le marquage isotopique est pertinent pour mesurer la bioaccumulation de faibles doses de nanoparticules dans un organisme. « Nos résultats sont préliminaires, souligne Corinne Cassier-Chauvat. Il faudra observer les effets à long terme et étudier l'influence de la taille et de la forme des nanoparticules sur la bioaccumulation et la toxicité. »


 


  1. Comme filtre ultra-violet dans les crèmes solaires ou comme blanchisseur dans les dentifrices. Ils sont aussi présents dans l'industrie alimentaire pour l'enrobage et le glaçage, dans l'industrie du bâtiment, etc.
  2. 1 nanomètre (nm) est 1000 millions de fois plus petit qu'un mètre
  3. Par exemple, l'eau de Seine contient moins de 1 mg/l de nanoparticules de TiO2 manufacturées
  4. Université Pierre et Marie Curie

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