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Une photoenzyme permet aux microalgues de produire des hydrocarbures


​Des chercheurs du BIAM (CEA/Cadarache), en collaboration avec une équipe de l'institut Frédéric Joliot (I2BC@Saclay), du laboratoire BGE et de l'ESFR (Grenoble) ont découvert une enzyme qui permet aux microalgues de transformer certains de leurs acides gras en hydrocarbures à l'aide de la seule énergie lumineuse. Publiée le 01/09/2017 dans Science, cette découverte majeure a fait l'objet d'un communiqué de presse.

Publié le 1 septembre 2017

L'enzyme, découverte chez la chlorelle, a été baptisée FAP (pour Fatty Acid Photodecarboxylase). Elle est d'un type très rare car seules quatre enzymes utilisant la lumière (photoenzymes) ont été identifiées jusqu'à présent dans le monde vivant. La chlorelle est une algue verte unicellulaire d'eau douce faisant partie des quelques microalgues cultivées industriellement et candidates pour la production de molécules carbonées riches en énergie. « C'est une avancée majeure dans l'identification de mécanismes du vivant permettant la conversion des acides gras des cellules en hydrocarbures et cela ouvre une nouvelle voie en vue de la synthèse d'hydrocarbures par des micro-organismes à une échelle industrielle », précisent les auteurs.

Dans cette étude, les chercheurs du BIAM ont pu identifier l'enzyme en suivant son activité, puis en déterminant une liste de candidats possibles grâce à une analyse protéomique réalisée au laboratoire BGE de Grenoble. L'expression dans E. coli du gène codant pour l'enzyme candidate a mis en évidence la production d'hydrocarbures, démontrant que cette enzyme était nécessaire et suffisante pour synthétiser ces molécules. La caractérisation de l'enzyme pure a révélé qu'elle coupait un acide gras en une molécule d'hydrocarbure et une molécule de CO2 et que cette activité nécessitait de la lumière (Figure 1).

Figure 1 : Schéma de la réaction catalysée par la FAP. Elle convertit en une seule étape un acide gras en hydrocarbure en enlevant le groupement carboxyle de la chaîne carbonée (réaction de décarboxylation). Sans lumière, l'enzyme est inactive.


Les chercheurs ont également montré que le cofacteur flavine adénine dinucléotide (FAD) présent dans l'enzyme permettait de capter la lumière bleue. La structure tridimensionnelle de l'enzyme (Figure 2), déterminée par diffraction aux rayons X (synchrotron européen, ESRF, Grenoble), ainsi que des études de spectroscopie d'absorption cinétique, réalisées à l'institut Frédéric Joliot (I2BC@Saclay), ont permis de proposer un modèle du mécanisme fonctionnel de l'enzyme. L'acide gras est positionné dans un tunnel hydrophobe au bout duquel se trouve le cofacteur. Ce dernier, lorsqu'il est excité par la lumière bleue, vient arracher un électron au groupement carboxyle de l'acide gras, conduisant à la décarboxylation spontanée en une molécule d'hydrocarbure.

 
 
 
Figure 2 : Coupe à travers la structure tridimensionnelle de la FAP. Le cofacteur dérivé de la flavine (FAD) est situé au fond d'un tunnel hydrophobe où se fixe l'acide gras (en vert). Le plan de coupe est indiqué en noir. © CEA-Biam/Pascal Arnoux.


La découverte de FAP revêt un grand intérêt au plan fondamental car seulement 4 autres photoenzymes sont connues à ce jour. FAP est au moins dix fois plus rapide que la meilleure enzyme de synthèse d'hydrocarbures connue, ce qui pourrait en faire un outil biotechnologique très efficace, soit par conversion in vitro d'huiles, soit par conversion in vivo des acides gras membranaires de bactéries, levures ou idéalement microalgues. Cette découverte est d'autant plus importante que, dans un contexte de transition énergétique, la production bio-sourcée d'hydrocarbures, utilisant le CO2 atmosphérique et limitant donc le rejet dans l'atmosphère de carbone stocké dans le sous-sol, est devenue un enjeu biotechnologique majeur.

Ce travail a fait l'objet d'un communiqué diffusé à la presse le 1er septembre 2017.

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