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Cerveau

IRM fonctionnelle : un outil performant pour évaluer les états de conscience


​Une collaboration internationale dirigée par une équipe de l’Institut du Cerveau et de la Moelle (ICM) montre qu’il est possible d’évaluer les états de conscience grâce à un procédé d’imagerie développé à NeuroSpin (CEA-Joliot). Ce nouvel outil pourrait aider à mieux diagnostiquer des altérations de la conscience. Les résultats ont été publiés dans Science Advances

Publié le 19 février 2019

​La conscience, cette connaissance que l'on a de soi et du monde qui nous entoure, varie selon notre état de vigilance. Le sommeil, une anesthésie générale mais aussi des lésions cérébrales altèrent notre niveau de conscience. Mais comment l'évaluer ? Plusieurs théories des neurosciences s'accordent pour penser que la conscience est un processus dynamique et complexe qui coordonne l'activité de différentes régions du cerveau, même distantes. Tout outil capable de mesurer cette coordination constitue donc potentiellement une aide considérable pour évaluer l'état de conscience.

C'est le cas de l'IRM fonctionnelle (IRMf). Cette technique permet de mesurer l'activité cérébrale dans différentes régions1 et d'identifier les communications – on parle de connectivités fonctionnelles, activatrices ou inhibitrices, – que les aires cérébrales sont capables d'établir. A l'aide de cette technique, une collaboration internationale, coordonnée par Jacobo Sitt de l'ICM – et à laquelle Stanislas Dehaene (NeuroSpin) a participé –, a suivi en temps réel les connectivités fonctionnelles entre 42 régions du cerveau, chez des individus sains et chez des patients ayant la conscience altérée (en état végétatif2 ou en état de conscience minimale3). L'étude montre que la configuration des connectivités n'est pas figée chez un individu donné mais qu'elle fluctue au cours du temps. Les analyses font émerger quatre configurations récurrentes distinctes de connectivités fonctionnelles. Dans la configuration 1, les connectivités sont les plus importantes, elles sont activatrices ou inhibitrices. A l'inverse, dans la configuration 4, les connectivités sont très rares et uniquement activatrices. Les configurations 2 et 3 sont intermédiaires. De plus, le nombre d'occurrences de l'une ou l'autre des quatre configurations principales diffère selon l'état de conscience de l'individu. La configuration 1 est majoritaire chez les individus « sains » alors que c'est la configuration 4 qui est la plus fréquente chez des personnes en état végétatif. Les patients en état de conscience minimale ont un profil intermédiaire.

Afin de s'assurer que ces quatre configurations sont bien liées à l'état de conscience, les chercheurs ont réalisé la même analyse chez des individus sous anesthésie générale. Ils montrent que les probabilités d'occurrence des quatre configurations s'uniformisent entre tous les individus, quel que soit leur état clinique initial, à partir du moment où ils sont anesthésiés : la probabilité d'occurrence des configurations complexes 1 et 2 diminue chez tous les individus et celle de la configuration 4, « sommaire », augmente. L'étude a ensuite été conduite chez un groupe de patients bien particulier : considérés cliniquement en état végétatif, une étude antérieure a montré qu'ils sont capables de pensées4. Chez eux, la probabilité que la configuration 4 soit adoptée est significativement plus faible que chez les autres patients en état végétatif.

L'ensemble des résultats montre que l'IRMf est un outil adapté pour évaluer en temps réel l'état de conscience d'un individu. Le fait que les patients végétatifs aient ponctuellement une configuration de leurs connectivités fonctionnelles de type complexe (2, voire 1) laisse penser qu'ils pourraient avoir des phases de consciences. Phases pendant lesquelles une communication avec eux serait possible ? De quoi alimenter de futures études.

Des travaux précurseurs à NeuroSpin

En 2015, l'équipe dirigée par Stanislas Dehaene (UNICOG) à NeuroSpin publiait dans PNAS les résultats d'une étude préclinique menée grâce à l'IRMf. Ces travaux montraient qu'il était possible de suivre en temps réel la configuration des connectivités fonctionnelles et que celle-ci variait au cours du temps. Ils montraient notamment que l'anesthésie générale limitait fortement le nombre et la complexité des configurations des connectivités par rapport à un état vigile.




[1] L'IRMf détecte les changements locaux de flux sanguin.

[2] L'état végétatif est défini par une absence de conscience et de réactivité. Les seules activités cérébrales maintenues sont des activités réflexes (comme le rythme cardiaque ou la respiration mais aussi mouvements oculaires, bâillements… ) et un cycle veille-sommeil.

[3] L'état de conscience minimale se distingue de l'état végétatif par la preuve clinique de l'existence d'activités cérébrales plus complexes comme saisir un objet, prononcer un petit nombre de mots…

[4] Lors de la précédente étude menée au Canada, il était demandé aux patients en état végétatif de suivre des ordres pour se représenter mentalement une action (par exemple jouer au tennis) durant l'enregistrement IRM. 


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