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Dès 6 mois de grossesse, le cerveau humain est organisé pour traiter la parole


Le cerveau immature d’un nouveau-né prématuré est capable, dès 3 mois avant le terme, de distinguer les syllabes et les voix masculines et féminines. Ces résultats, obtenus notamment par des chercheurs de l’Inserm, de l’Université de Picardie Jules Verne et du centre d’imagerie NeuroSpin du CEA, sont publiés dans la revue PNAS datée du 25 février 2013. Ils soulignent une organisation sophistiquée très précoce des régions cérébrales impliquées dans le traitement linguistique et la communication sociale chez l’Homme.​

Publié le 26 février 2013

​A la naissance, les nouveau-nés sont capables de distinguer des syllabes proches, de reconnaître la voix de leur mère, et de différentier différentes langues humaines. Ces capacités chez le petit humain sont-elles dues à la présence de mécanismes innés propres à l’espèce humaine pour traiter la parole, ou à un apprentissage rapide des caractéristiques de la voix maternelle pendant les dernières semaines de grossesse ?

Pour le savoir, Fabrice Wallois, directeur de l’unité mixte de recherche UPJV/Inserm « Groupe de Recherche sur l’Analyse Multimodale de la Fonction Cérébrale » (GRAMFC), et Ghislaine Dehaene-Lambertz, (Inserm, NeuroSpin/Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), Université Paris-Sud) en collaboration avec des praticiens hospitaliers du CHU Amiens Picardie, ont testé les capacités de discrimination auditive de 12 nouveau-nés prématurés de 28 à 32 semaines d’aménorrhée, c’est-à-dire nés 2 à 3 mois avant le terme.

A ce stade de développement, le cerveau est immature puisque les neurones sont encore en train de migrer vers leur localisation définitive. Néanmoins, les premières connexions entre le cerveau et le monde extérieur se mettent en place, notamment celles permettant au fœtus d’entendre les sons, ce qui permet d’enregistrer les premières réponses cérébrales aux stimulations externes.

Les auteurs de cette étude ont stimulé auditivement les nouveau-nés prématurés, en les exposant à deux sons de syllabes proches (« ga » et « ba ») prononcées soit par un homme soit par une femme. Ils ont enregistré leur réponse cérébrale grâce à l’imagerie optique fonctionnelle (spectroscopie proche infra-rouge). Les chercheurs ont ainsi pu montrer que malgré leur cerveau immature, les prématurés sont réceptifs aux changements de voix (homme ou femme) et aux changements de phonèmes (« ba » ou « ga ») (figure 1).

De plus, les ensembles ou réseaux de neurones impliqués chez le prématuré sont très proches de ceux décrits chez l’adulte dans le même type de tâche. Ils sont asymétriques et impliquent notamment les régions frontales. Comme chez l’adulte, la région frontale droite répond à la nouveauté, quel que soit le changement, alors que la région frontale gauche, ou région de Broca, ne répond qu’au changement de phonème.

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Figure 1 : Projection des activations sur le cerveau d’un prématuré de 30 semaines d’aménorrhée. Le changement de phonème entraine une augmentation de l’activité cérébrale dans les régions temporales et frontales, notamment à gauche. La réponse au changement de voix est plus limitée, et ne concerne que la région frontale inférieure droite. (© PNAS)

Ces résultats démontrent que très précocement, dès l’établissement des premières connexions cérébrales (trois mois avant le terme) et avant tout éventuel apprentissage, le cerveau humain est équipé pour traiter les caractéristiques particulières de la parole humaine grâce à une organisation sophistiquée de certaines aires linguistiques cérébrales (régions péri-sylviennes droite et gauche). L’organisation des aires cérébrales étant gouvernée par l’expression des gènes au cours du développement du fœtus, les auteurs suggèrent que l’apparition du langage est en grande partie influencée par la génétique et donc par des mécanismes innés.


Ces résultats sont issus des recherches de l’unité de recherche Inserm U1105 « Groupe de Recherche sur l’Analyse Multimodale de la Fonction Cérébrale » de l’Université de Picardie Jules Verne (UPJV) et de l’unité de recherche Inserm U992 « Neuroimagerie cognitive », NeuroSpin/CEA.

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